Lettre de Laure

Bonjour,

Je m’appelle Laure. J’ai quarante-cinq ans. Je suis mariée depuis seize ans à Thomas. Mère de deux adolescents, directrice d’une petite librairie en Bretagne. Et salope.

Ce mot, je ne l’aurais jamais écrit il y a cinq ans. Aujourd’hui, je le chéris. Je le porte. Il est tatoué quelque part, discret, entre deux replis de peau où seul mon mari vient lire.

Je vous écris cette lettre parce que j’ai lu vos nouvelles. Parce que je m’y suis reconnue. Parce qu’il est temps que je raconte moi aussi. Ce qui m’est arrivé. Ce que nous avons choisi.

Je vais tout vous dire.

Tout a commencé un soir de décembre. Nous avions bu. Nous étions fatigués. Le feu de la cheminée était mourant. Il m’a dit : « Tu sais… je crois que j’aimerais te voir avec un autre homme. »

J’ai cru qu’il plaisantait. Puis j’ai vu son regard. Grave. Honnête. Brûlant.

J’ai d’abord ri. Puis je me suis mordu les lèvres. J’ai pensé à ce que cela ferait. À ce que je deviendrais. Une traître. Une putain. Ou une reine.

J’ai dit : « Trouve-le. Choisis-le. Prépare-moi. »

Il s’appelait Romain. Grand, silencieux, regard noir et voix rauque. Mon mari m’avait habillée pour lui : porte-jarretelles noir, talons hauts, robe ouverte sur le devant. Sans culotte. Les mains liées derrière le dos.

Il avait fixé une caméra. Il regardait tout. Ne participait pas. Pas encore.

Je tremblais.

Romain m’a déshabillée sans me toucher. Juste en me regardant. Puis il m’a dévorée. Lentement. Avec cruauté. Avec science. À genoux. À quatre pattes. En détournant les yeux. En me parlant salement.

Mon mari filmait.

J’ai joui si fort que j’ai mordu la moquette.

Et je l’ai regardé. Mon mari. Il souriait. Il bandait fort. Et j’ai compris.

Il ne me partageait pas.

Il me couronnait.

Les semaines suivantes, tout s’est enchaîné. J’ai couché avec deux hommes en même temps. Avec une femme. Puis une autre. Mon mari me faisait porter des tenues dégoutantes. Il me demandait de raconter. En détails. Il me punissait aussi. Quand j’oubliais d’être une salope.

Un jour, il m’a livré à un inconnu dans une chambre d’hôtel. Il m’avait bandé les yeux, laissé nue sur le lit. Quand l’homme est entré, j’ai su que j’étais perdue. Je me suis offerte comme une bête. Je lui ai dit : « Prends-moi. Je suis à mon mari. Il m’offre. Sers-toi. »

J’ai senti mes limites s’effondrer ce jour-là.

Et mon corps s’ouvrir, comme jamais.

Je suis devenue autre. Il m’appelle sa salope. Je le dis moi aussi. En souriant. En léchant ses doigts. En le regardant baiser d’autres femmes pendant que je me touche.

Je suis devenue candauliste. Soumise. Avide.

Et libre.

Parce que c’est lui. Parce qu’il veille. Parce qu’il m’aime. À genoux, oui. Mais la tête haute.

Parce que c’est notre secret. Notre révolution discrète.

Je ne pensais pas écrire tout cela. Et pourtant, me voilà.

Je vous laisse cette lettre. Ce témoignage. Ce cri sale et doux d’une femme qui croyait avoir tout compris. Et qui se découvre encore, chaque soir, sous un nouveau regard. Sous un nouveau corps. Sous les ordres de l’homme qu’elle aime.

Si vous la publiez, signez simplement :

Laure, lectrice fidèle des Caresses de l’Interdit

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